La violence c'est quoi ?
Comme beaucoup, j'ai été révoltée d'abord par les propos de Sarkozy, “racaille”, “vrais jeunes”, ensuite par les mesures prises par Villepin, décret d'état d'urgence, couvre-feu. Et aussi par les propositions, apprentissage à 14 ans, expulsion des étrangers condamnés. Que faire ? Déjà réfléchir, se demander, demander, mais enfin, LA VIOLENCE C'EST QUOI ? Pour moi, là encore comme pour beaucoup, une cité ordinaire et calme, avec ses barres tranquilles, ses cages d'escalier en ruine, ses ascenseurs en panne, c'est violent. Des classes de 35 élèves, en primaire, au collège, c'est violent. Des parents au chômage depuis des années, c'est violent. Et une dalle claire et lisse devant un centre commercial ordinaire, quelque part part et n'importe où et où on est nulle part, c'est aussi très violent. Il y a une violence liée à l'abandon, et elle traverse les enfants, les adolescents. Image, vraie, d'il y a déjà dix ans : banlieue sud, un enfant de trois ans allant seul à la crèche. On pense à des situations bien connues dans des pays dits pauvres, dits sous-développés, comme le Brésil ou le Mexique, où la misère et le malheur vont avec la délinquance, voire la criminalité, des tout jeunes, comme avec la violence de proximité. S'attaquer au voisin, s'attaquer à ses propres écoles, équipements, transports. Schizophrénie de la misère. Désespoir. Essayer de réfléchir : parce que se fermer à cette question, c'est s'enfermer et chercher à enfermer les autres. Exemple, stupéfiant : le député UMP Jacques-Alain Bénisti a remis mardi 8 novembre son rapport “sur la prévention de la délinquance” commandé il y a deux ans. Dans ce rapport il préconise le “dépistage des signes de délinquance dès la crèche”. La délinquance : une maladie héréditaire, sans doute, une tare ! Dans le projet initial, octobre 2004, modifié pour cause de tollé, il demandait, petit Big Brother, qu'on impose le français comme langue unique à la maison. Logique tautologique et totalitaire : un Français est un Français qui parle français. Alors essayer de définir de façon précise, détaillée, la violence, c'est peut-être en même temps une façon concrète et vivante d'essayer de définir, évidemment à l'opposé, la démocratie.
à suivre
Leslie Kaplan